Liva Ramanandraibe, fondateur de la marque Ibeliv, valorise le raphia malgache

Interview



  

    
      
    
      

  

  
    "Faire du beau en faisant du bien"  : Liva Ramanandraibe, fondateur de la marque Ibeliv, valorise le raphia de Madagascar
          Les sacs, pochettes et chapeaux produits par des artisanes malgaches subliment le raphia de l'île de Madagascar. Ibeliv, entreprise basée en Provence, célèbre cette année sa dixième collection.

Les artisans malgaches utilisent le raphia de Madagascar pour confectionner des sacs, pochettes et chapeaux d’une grande beauté. Ibeliv, une entreprise établie en Provence, fête cette année le lancement de sa dixième collection mettant en valeur le travail des artisanes malgaches.

Liva Ramanandraibe, le fondateur de la marque Ibeliv, est responsable de la direction artistique en France, tandis que les pièces sont fabriquées à la main dans les ateliers à Madagascar. La société est profondément attachée à des valeurs sociales et environnementales qui sont au cœur de la marque et guident ses choix de production.

Les ateliers offrent une opportunité professionnelle à 2 000 Malgaches issus de zones rurales défavorisées. En plus de contribuer à leur émancipation financière, les artisans contribuent à mettre leur pays sur la carte mondiale de la mode tout en relevant des défis environnementaux. Cette activité permet de concilier l’intérêt économique des populations rurales avec la préservation des palmiers de raphia, une espèce endémique autrefois menacée. Nous avons rencontré Liva Ramanandraibe pour en apprendre davantage.

### Collection Ibeliv, modèle Cocktail lifestyle

Franceinfo culture : Ibeliv célèbre ses dix ans cette année. Pouvez-vous nous raconter l’histoire de cette marque lancée avec votre mère Tiana?

Liva Ramanandraibe : Le nom que nous avons choisi, Ibeliv, se prononce « I believe » (Je crois). Au-delà d’une simple marque, c’est une philosophie qui guide nos actions de manière positive et pleine de foi. Notre ambition est de créer du beau en faisant du bien. Notre mission est de mettre en avant Madagascar à travers la valorisation de son artisanat et de propager cette vision à grande échelle. C’est le leitmotiv de notre entreprise familiale que je partage avec ma mère et mon frère Narindra. En tant que père de trois filles, j’espère avoir posé les bases d’une aventure qui perdurera dans le temps.

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Vous assurez la direction stylistique, mais vous avez une formation en expertise comptable. Comment en êtes-vous arrivé au stylisme?

Le stylisme est pour moi une vocation. Mon objectif principal est de partager et d’éveiller des émotions à travers mes créations. Ces émotions sont le fruit de mon vécu, de mon amour pour Madagascar et des rencontres qui ont façonné ma personnalité. Ma mère Tiana joue un rôle crucial dans nos recherches. Sa grande expertise des techniques artisanales et son sens esthétique sont des atouts précieux lors du développement de nos collections.

La société est basée en France, mais la fabrication se fait à Madagascar. Pourquoi ce choix?

À mon arrivée en France, je me suis installé en Provence, à Arles. Quitter Madagascar a été une décision difficile, mais j’ai trouvé un équilibre en découvrant la beauté de la Provence et en faisant des rencontres enrichissantes. La France m’a offert de nouvelles opportunités d’apprentissage et d’éducation. Ibeliv est le fruit d’une fusion de cultures visant à offrir le meilleur.

### Collection Ibeliv été 2024, chapeau Playa et sac Nosy

Vous créez des sacs, des chapeaux et des pochettes. Quelles sont vos pièces les plus emblématiques?

Parmi nos sacs emblématiques, on retrouve le Vanilla, le Tokyo, l’Onja, le Mirozy et le Laza. Pour les chapeaux, l’Andao, le Lubeman, le Safari et l’Izy sont très appréciés. Chaque pièce raconte une histoire inspirante. Lorsqu’elles sont portées et usées, elles deviennent encore plus belles, conservant les marques de leur utilisation qui transmettent une émotion authentique. Nous nous efforçons de refléter la nature à travers nos créations, comme le modèle Ravina qui mêle crochet, broderies et motifs fleuris en ton sur ton. Notre objectif est d’offrir une palette artisanale variée.

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Chaque collection propose une vingtaine de sacs et une dizaine de chapeaux, déclinés en différents coloris tels que le Tea, un classique du raphia, ou le Dark Tea, représentatif de notre identité. Chaque année, nous cherchons à innover en proposant de nouvelles couleurs pour révéler les multiples facettes du raphia.

Vous employez 2 000 femmes qui pratiquent le crochet, une tradition transmise de génération en génération à Madagascar.

Ibeliv est une grande famille où les connaissances et les savoir-faire se transmettent naturellement. Le partage est au cœur de nos valeurs. L’épanouissement financier des artisanes les plus expérimentées sert de modèle aux plus jeunes, car l’artisanat est un domaine d’avenir qu’il est essentiel de valoriser dans la transmission. Nous faisons le choix de miser sur l’humain et de mettre en avant l’intelligence émotionnelle à une époque où l’intelligence artificielle et les produits industriels dominent.

Chacune de vos créations mentionne le nom de l’artisane qui l’a réalisée. Est-ce un moyen de mettre en avant ces femmes?

Cette démarche est fondamentale. Elle crée un lien social entre la personne qui porte nos produits et l’artisane qui les a confectionnés avec amour. C’est une reconnaissance du travail des artisanes, qui sont les véritables créatrices de valeur. Au-delà de valoriser ces femmes, nous souhaitons offrir à Madagascar et à ses talents la visibilité qu’ils méritent.

Vous utilisez le raphia, trésor naturel de Madagascar. Pourquoi est-il menacé?

À Madagascar, le riz est l’aliment de base et le raphia pousse dans des zones marécageuses idéales pour la riziculture. Les habitants déboisent les palmiers de raphia pour créer des rizières, pensant ainsi assurer leurs revenus à court terme.

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Cependant, il s’agit d’une vision à court terme, car le raphia est essentiel à la biodiversité. En valorisant cette filière, nous montrons qu’il est possible de concilier préservation de l’environnement et développement économique. Au départ sceptiques, les habitants ont été enthousiasmés en voyant les résultats positifs de notre démarche.

Comment luttez-vous contre cette déforestation?

Ibeliv s’engage dans la lutte contre la déforestation de deux manières. En amont, nous avons une concession de 35 hectares en partenariat avec les communautés locales, où nous plantons 6 000 palmiers de raphia chaque année depuis trois ans. En aval, nous valorisons la matière première à travers un artisanat haut de gamme qui préserve les savoir-faire anciens de Madagascar. Offrir un emploi stable à 2 000 femmes est une preuve concrète de notre engagement à réconcilier l’humain avec la nature. Les défis sont nombreux, mais je reste optimiste.

Associé au raphia, le cuir sublime certaines de vos créations. Pourquoi privilégiez-vous un tannage végétal plutôt que minéral?

Le tannage minéral, à base de sel de chrome, est le procédé le plus répandu. Cependant, nous lui préférons le tannage végétal, inspiré de la nature et utilisant des tanins végétaux issus des plantes. Cette technique plus longue offre de nombreux avantages, notamment la sécurité sanitaire des artisans et des consommateurs, une meilleure qualité du cuir et des teintes plus profondes et nuancées. Le tannage végétal permet également au cuir de mieux résister à l’humidité et de développer une belle patine avec le temps.

Source de l’article : Francetvinfo

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